Le fardeau du ministère public lorsqu’il porte en appel un verdict d’acquittement
04 jeu, 2021
Lorsque le suspect d’un crime est un parfait inconnu pour la victime, une technique policière courante est de procéder à une parade d’identification dans laquelle le plaignant tente d’identifier son agresseur parmi une série d’individus qui correspondent à la description donnée aux policiers. « Il est cependant établi depuis longtemps qu’un appel interjeté par le procureur général ne saurait être accueilli sur une possibilité abstraite ou purement hypothétique selon laquelle l’accusé aurait été déclaré coupable n’eût été l’erreur de droit[1]. »
Les faits
Au procès, la juge de la Cour municipale a exclu une photo du permis de conduire de l’accusé obtenue en contravention à la Charte canadienne des droits et libertés. Cette photo était celle utilisée lors de la parade d’identification. La juge était d’avis que l’identification faite au procès avait été contaminée par cette photographie et qu’il existait un doute raisonnable quant à l’identité de l’agresseur. Elle a donc acquitté l’accusé. Le ministère public a porté la cause en appel et la Cour supérieure a ordonné un nouveau procès considérant que la Juge de première instance avait commis une erreur en excluant la photo du permis de conduire. Cette décision a subséquemment été portée devant la Cour d’appel du Québec par l’accusé.
Le jugement
La Cour d’appel a infirmé la décision de la Cour supérieure et a acquitté l’accusé. La Cour d’appel souligne que lorsque le ministère public se pourvoit en appel d’un acquittement, il a le fardeau particulièrement lourd de démontrer que l’erreur commise au procès a eu une importance significative sur le verdict. En l’espèce, la décision de la juge de la Cour municipale concernant l’exclusion de la photographie du permis de conduire n’a eu aucune influence sur le verdict. En effet, la juge du procès conservait tout de même un doute raisonnable concernant l’identification de l’agression, car le plaignant ainsi qu’un témoin oculaire ont indiqué qu’ils n’étaient pas totalement certains que l’accusé était l’agresseur. Cet arrêt illustre bien le fardeau qui incombe à la poursuite lorsqu’elle interjette appel d’un verdict d’acquittement. Il n’est pas suffisant de prouver que le juge de première instance a erré en droit, mais encore qu’il y a un « degré raisonnable de certitude » que son erreur a pu influer le résultat final.