
Lorsque le caractère d’une décision est définitif, tel que le plaidoyer de non-culpabilité en raison de trouble mentaux, le droit exige que la décision soit libre, éclairée et non-équivoque. Pour que cette dernière soit éclairée, il faut que l’accusé ait connaissance des conséquences associées audit verdict. En l’occurrence, l’appelant soutient que dû à son état mental de l’époque, sa décision ne répondait pas aux exigences.
« Selon la démarche établie dans l’arrêt Wong, l’appelant qui demande l’annulation du jugement de culpabilité prononcé à la suite de son plaidoyer de culpabilité doit établir l’existence d’une possibilité raisonnable que, si sa décision avait été mieux informée, il aurait soit opté pour un procès et plaidé non coupable, soit plaidé coupable, mais à d’autres conditions[1]. »
D.N. c. R., 2021 QCCA 899
Les faits
L’appelant se pourvoit contre un verdict de non-responsabilité pour cause de troubles mentaux rendu par la Cour du Québec. Le juge conclu que l’appelant a commis les gestes (actus reus) à l’origine des trois chefs d’accusation et qu’il y a lieu de prononcer un verdict de non-responsabilité criminel pour cause de trouble mentaux à son égard. Les ordonnances suivantes sont prononcées, soit la détention avec modalités à l’hôpital, le prélèvement d’un échantillon d’ADN, l’interdiction de possession d’armes, et, enfin, une ordonnance lui enjoignant de se conformer à perpétuité à la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels (ci-après « LERDS ») (art. 490.012 (1) et 490.013 (2.1) du Code criminel).
L’appelant prétend qu’au moment du procès son état mental ne lui avait pas permis de comprendre adéquatement qu’il devrait se soumettre à l’ordonnance en vertu de la LERDS. Une bonne compréhension l’aurait amené à «plaider non coupable et exigé la tenue d’un nouveau procès ou aurait plaidé coupable, mais à d’autres conditions[2]». L’appelant soumet que la Cour d’appel (ci-après « la Cour ») devrait faire son analyse selon la démarche retenue dans l’arrêt Wong[3] et, ce, malgré que cet arrêt porte sur l’annulation d’un verdict de culpabilité ainsi que sur son plaidoyer de culpabilité sous-jacent et non, sur l’annulation d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de trouble mentaux tel qu’en l’espèce.
Le jugement
La Cour d’appel (ci-après « la Cour ») rejette l’appel.
Selon la démarche retenue dans l’arrêt Wong, modifiée par la Cour en tenant compte qu’il s’agit en l’occurrence d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de trouble mentaux, l’appelant doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa décision n’était pas libre, sans équivoque et éclairé. En d’autres mots, M. D.N. doit démontrer « selon la prépondérance des probabilités, d’une part, que sa décision n’était pas éclairée en raison d’un manque d’informations ou de son incompréhension des informations reçues et, d’autre part, l’existence d’un préjudice découlant d’une possibilité raisonnable que, si sa décision avait été mieux informée, il aurait soit plaidé non coupable et fait le procès sans soulever la question de son état mental, soit plaidé non coupable en raison de ses troubles mentaux, mais à des conditions moins contraignantes.[4] » L’appelant soulevant le caractère volontaire de sa décision, la Cour doit évaluer la véracité de sa prétention.
Il ressort de la courte preuve présenté par l’appelant que contrairement à ce qu’il prétends, ce dernier était informé du sens de la défense de non-responsabilité criminelle pour cause de trouble mentaux, M. D.N. étant, de plus, familier avec ce verdict l’ayant déjà soulevé par le passé. En outre, la transcription de l’audience révèle que l’appelant, par l’entremise de son avocat, consent au verdict émis par le juge. L’appelant était aussi informé de la conséquence juridique lui ordonnant de se soumettre au registre des délinquants sexuels. De surcroit, à la lumière de la preuve, rien de laisse croire que l’appelant n’avait pas l’aptitude nécessaire pour subir son procès. La Cour en infère alors qu’il était en mesure de comprendre les conséquences éventuelles du verdict ainsi que de donner des instructions à son avocat. Ce faisant, M. D.N. ne se décharge pas de son fardeau de démontrer que la défense soulevée n’était autre que volontaire. La Cour n’étant pas convaincue, elle rejette sa demande.
Sources:
↩1 | D.N. c. R., 2021 QCCA 899, para. 10 |
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↩2 | Requête en autorisation d’appel d’une déclaration de culpabilité (demande de retrait d’un plaidoyer de culpabilité), le 23 janvier 2020, paragr. 11. L’appelant fait référence à une demande de retrait d’un plaidoyer de culpabilité, mais, de fait, il n’a pas plaidé coupable. Une fois les faits allégués par la poursuite admis (art. 655 C.cr.), il a présenté une défense de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux que la poursuite a reconnue et que le juge a, à son tour, acceptée. |
↩3 | R. c. Wong, 2018 CSC 25, [2018] 1 RCS 696, [Wong], sous la plume des juges Moldaver, Gascon et Brown, auxquels le juge Rowe s’est rallié. |
↩4 | D.N. c. R., 2021 QCCA 899, para. 11 |
Publié le 15/05/2022